Un trimestre sans précédent

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Bonsoir chers clients,

En ce début de semaine et surtout en cette fin de trimestre, l’étrangeté de la période que l’on traverse sur les marchés financiers s’est poursuivie. Afin d’illustrer à quel point l’environnement actuel d’investissement est loin d’être «normal», rappelons le comportement du jour des places boursières au Canada et aux USA en parallèle avec des nouvelles moins que reluisantes :

Illustration au Canada :

  • Une mesure de la confiance des consommateurs (Bloomberg Nanos) est sortie à son plus bas depuis que des mesures hebdomadaires sont colligées, alors que les deux tiers des répondants craignaient que l’économie ne soit pire dans 6 mois;
  • Des signes évidents de ralentissement, voire d’arrêt abrupt, apparaissent dans le secteur de l’immobilier qui représente le principal actif d’une grande partie des ménages. C’est un chamboulement du marché immobilier qui avait causé la crise financière de 2008, avec un effet domino qui s’était propagé à toute l’économie;
  • Les nouvelles demandes d’assurance-emploi ont maintenant dépassé 1,5 million, fracassant ainsi à nouveau un record. Au-delà des statistiques, il s’agit d’autant de gens qui traverseront une période difficile et qui contribueront moins à l’économie, à la fois comme travailleurs et comme consommateurs.

La réaction de l’indice TSX à ces nouvelles? Il a terminé la journée en territoire positif.

Illustration aux USA :

  • Une banque membre de la Réserve fédérale américaine a estimé que 47 millions d’emplois pourraient être perdus aux États-Unis ces prochaines semaines à cause du coronavirus et que le taux de chômage pourrait y dépasser les 30%. Que l’on soit d’accord ou non avec ces pronostics, il n’en demeure pas moins que le ton est donné, qui plus est par une institution qui sera au centre de la résolution de cette crise;
  • L’omniprésente VISA a rapporté une forte baisse des activités sur ses plateformes, même les activités provenant des achats en ligne alors que plusieurs s’attendaient à y voir un déplacement de la consommation;
  • Des appels aux taux d’intérêt négatifs se font entendre (dont le président Trump) pour tenter de contrer l’écroulement pressenti de l’économie. Le spectre des taux négatifs permet d’ailleurs à un actif refuge comme l’or de terminer en hausse pour un 6e trimestre consécutif;
  • Le 1er avril étant mercredi cette semaine, les craintes sont fortes que plusieurs ménages américains ne soient déjà en défaut de paiement alors que les loyers et les paiements dus à cette date dépassent les 200 milliards (en dollars CAD) pour cette seule journée.

La réaction des bourses américaines (S&P, Dow, NASDAQ) à ces nouvelles? Une séance en territoire positif aussi.

Rappelons que le même phénomène s’était produit la semaine dernière alors que les marchés avaient fini à la hausse la journée même où on avait annoncé le plus haut nombre de nouveaux chômeurs de l’histoire des États-Unis. La réalité est qu’il faudra sans doute s’attendre à voir des phénomènes difficiles à expliquer en termes logiques au cours des prochaines semaines alors que les autorités se démènent avec une situation jamais vue et dont l’incertitude est quasi-totale.

Certains facteurs connus peuvent cependant expliquer en partie ces mouvements boursiers détachés des nouvelles économiques réelles :

  • En fin de trimestre, les plus grands investisseurs institutionnels (e.g. les fonds de pension) effectuent le rééquilibrage de leurs portefeuilles selon les politiques d’investissement et ils doivent acheter des actions pour corriger leur poids réduit par la chute récente. On parle ici de centaines de milliards de dollars qui ont un impact technique important sur la bourse, quelle que soit leur analyse de la faiblesse sous-jacente de l’économie.
  • Le facteur psychologique n’est jamais très loin même au sein d’institutions que l’on pourrait croire rationnelles et détachées de certaines émotions. Ce réflexe mène à un espoir optimiste que les mesures de soutien pratiquement infinies annoncées par la Réserve fédérale pourront en quelque sorte nier l’évidence d’un ralentissement économique d’une rapidité sans précédent dans l’histoire moderne.

Quelle volatilité?

Autre phénomène très humain en finance : les investisseurs finissent par s’habituer à tout et ils en oublient le gros bon sens quand les surprises quotidiennes deviennent la nouvelle réalité. À cet égard, l’une des mesures de volatilité du marché américain les plus suivies demeure l’indice VIX, basé sur un ensemble d’options sur le S&P500. Cet indice se situe normalement aux alentours de 20, ce qu’on pourrait qualifier d’environnement standard.

Or au milieu du mois de mars, il a brièvement dépassé les 80 alors que les journées records à la hausse et à la baisse se succédaient sur les bourses. Puis le VIX est par la suite redescendu graduellement pour terminer aujourd’hui sous les 60 pour la première fois depuis. Dans l’absolu, la volatilité actuelle demeure donc sans conteste à un niveau extrêmement élevé, mais relativement au sommet de la mi-mars ce niveau donne pratiquement l’impression de n’être plus un problème. Tout est relatif, disait Einstein. Dommage que E=mc2 n’aide pas à prévoir les mouvements de la bourse.

Un épisode différent

Depuis la Grande Dépression des années 30, les marchés boursiers ont connu une bonne vingtaine d’épisodes où des pertes de plus de 20% étaient encaissées. Ces événements périodiques sont en quelque sorte dans la nature des choses et arrivent donc en moyenne environ deux fois par décennie. Dans une douzaine de ces cas, les pertes étaient même de 30% ou plus, donc environ aux 7 ans en moyenne. Cet élément de risque fait partie intrinsèque de l’investissement et va de pair avec la recherche de rendement. Ceci dit, la plupart des crises précédentes comportaient moins d’incertitude (corona en tête) que le cas qui nous occupe.

Pour citer l’analyste Ben Carlson, le manque de repères habituels est tellement évident actuellement que l’un des actifs qu’il faut absolument détenir est l’humilité. Dans cette optique, nous continuons donc à penser qu’il faudra d’abord attendre de traverser le deuxième trimestre qui s’amorce, avec toutes les nouvelles difficiles qu’il comportera, avant d’avoir une image plus claire de ce qu’on trouvera de l’autre côté.

Dans tous les cas, notre priorité demeure la préservation de vos actifs. C’est pourquoi notre positionnement défensif, qui a jusqu’ici été extrêmement salutaire, demeure la stratégie que nous adoptons alors que l’on suit toujours d’aussi près tous les développements significatifs. Avec un tel coussin défensif en banque, la prudence est nettement mieux avisée que la témérité.

Q2 > Q1 ?

Notons que le trimestre qui se termine demain aura été le pire de l’histoire boursière en Europe et le pire depuis la crise de 2008 pour l’Amérique du Nord. Le moment viendra évidemment de reconsidérer l’économie comme étant solide et digne de confiance sur le plan boursier, mais ce n’est pas ce que laissent présager les signaux actuels. Est-ce que la reprise se pointera au troisième trimestre ou plutôt en fin d’année, voyons les choses évoluer en espérant que le coronavirus, principal responsable de la situation, soit vaincu le plus rapidement possible.

Comme toujours, n’hésitez pas à nous contacter pour toute question, et surtout prenez bien soin des vôtres!

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