Quand le vent tournera-t-il?

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Bonsoir à vous chers clients,

Nous vous parlions la semaine dernière du moment auquel il serait recommandé de renouer avec la classe d’actif boursière. En ce lundi, les principaux indices ont à nouveau bougé vers le bas pour ajouter au réajustement qui sévit depuis le sommet historique du 19 février. C’est maintenant près de 35% qui a été retranché de l’indice de référence S&P500 par rapport à sa valeur maximale d’il y a un mois.

Est-ce à dire qu’il est temps de réinvestir en actions? Nous pensons toujours qu’il est trop tôt, et voici quelques éléments d’explication.

On pourrait penser que, comme la tendance à long terme est haussière sur les marchés boursiers et qu’une perte 35% a déjà été enregistrée, les indices finiront bien par remonter la pente et reprendre le chemin d’un bull market. Mais (et c’est un gros mais):

  • Le niveau d’incertitude actuel sur les marchés est pratiquement sans précédent (merci au coronavirus), ce qui demeurera défavorable au secteur des actions
  • La volatilité est encore très forte relativement à ses niveaux historiques, ce qui est défavorable au secteur des actions
  • Chaque session positive a été suivie d’une forte baisse le lendemain ces derniers temps, indiquant le manque de fondement solide des tentatives de regain
  • Les chiffres de l’emploi commencent à incorporer les premiers effets du coronavirus et ils sont pour le moins désastreux, ce qui nuira à la confiance des consommateurs et, par ricochet, au secteur des actions
  • Les résultats financiers des entreprises seront inévitablement décevants au sein d’une économie qui roulera au ralenti pour plusieurs semaines, ce qui nuira au secteur des actions
  • Des décotes de nombreuses entreprises sont à toutes fins pratiques inévitables et seront défavorables au secteur des actions
  • Les mesures gouvernementales de confinement –nécessaires mais drastiques– créeront avec certitude une récession que certaines institutions (dont le FMI) prévoient aussi sévère que lors de la crise financière d’il y a 10 ans, avec les conséquences potentielles que l’on connait sur les actions
  • Le système financier non bancaire (shadow banking) est endetté avec un effet de levier substantiel qui résistera mal à la crise du crédit escomptée, ce qui retiendra à la baisse les actions
  • Dans l’histoire des bear markets, plusieurs occurrences ont été bien pires que le 35% réalisé jusqu’ici dans cet épisode, ce qui rend une descente additionnelle plutôt vraisemblable étant donné le contexte de pandémie globale rare auquel on fait face

Cela étant dit, ça remontera un jour, en temps et lieu. Comment suivre l’évolution des marchés et des données économiques pour tenter de discerner le bon timing et rééquilibrer les portefeuilles?

Les signaux économiques sont nombreux et aucun n’est infaillible, mais une combinaison de plusieurs signaux qui s’alignent à un moment précis aide à voir tourner le vent. Ces signaux incluent :

  • Les mesures de confiance des entreprises et des consommateurs (ils sont un moteur crucial de la santé d’une économie)
  • Le revenu personnel disponible
  • Les ventes au détail
  • Les résultats financiers trimestriels des compagnies publiques
  • Certains ratios comme le cours/bénéfice (P/E)
  • La production industrielle et la croissance du PIB
  • Les chiffres sur l’emploi
  • Les mises en chantier (résidentielles et commerciales)
  • Le prix des maisons
  • La disponibilité et l’accessibilité du crédit pour la croissance des entreprises et la création d’emplois
  • Le prix du pétrole et des matières premières
  • L’évolution du taux d’inflation (ou de déflation)
  • L’endettement des ménages
  • Le taux de faillites corporatives et personnelles
  • L’observation de certains facteur techniques reliés à la recherche de liquidité quand diverses institutions se voient forcées de vendre des actifs pour rencontrer leurs obligations de retraits ou d’échéance de dette
  • Les marchés boursiers eux-mêmes, lorsqu’ils arrivent enfin à cumuler quelques séances positives sans laisser partir tous les gains peu de temps après
  • Les prévisions économiques des grandes banques et des institutions internationales comme le FMI, la Banque Mondiale ou l’OCDE
  • La politique fiscale et la politique monétaire, incluant l’évolution des taux d’intérêt directeurs, qui envoient un message aux marchés sur l’état de l’économie tel que perçue par les analyses internes du gouvernement

Ces jours-ci, il va sans dire qu’à peu près tous ces signaux sont résolument tournés au rouge, ce qui annonce clairement le stade de récession dans le cycle économique (voir graphique). Techniquement, cela nécessitera deux trimestres de décroissance du PIB pour qu’on officialise une récession. En soi, ce n’est rien de bien nouveau puisque cette récession s’ajouterait à plus de 30 récessions vécues depuis le milieu du XIXe siècle. Cependant, son ampleur dépendrait d’un facteur sanitaire (la COVID-19) davantage que d’un phénomène purement financier.

Mais de là à dire que nous vivrons une dépression économique, c’est un peu tôt pour le craindre. Une seule est survenue il y a de cela près d’un siècle et nous sommes encore loin d’une telle calamité, puisque la bourse avait perdu 90% de sa valeur durant la Grande Dépression des années 30. Qui plus est, les outils de politique monétaire et de politique fiscale dont disposent aujourd’hui les banques centrales sont beaucoup plus sophistiqués –et utilisés– qu’à l’époque.

Ça fait donc partie de notre travail quotidien de suivre les divers signaux que nous envoient les marchés et les gouvernements pour maximiser les chances de bien identifier les cycles économiques. Si personne ne peut prédire avec certitude le moment où les marchés reprendront de la vigueur, et donc si la plupart des investisseurs craignent de manquer l’instant précis où le cycle tournera, il est rassurant dans notre cas de pouvoir nous dire que grâce au positionnement défensif que nous avions depuis le début de la séquence baissière nous avons un coussin pour constater l’arrivée de la reprise et rééquilibrer les portefeuilles en conséquence.

D’ici là, nous serons rivés à nos écrans. Bon confinement et surtout, gardez le moral!

Votre équipe