La valeur des choses

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En cette époque que nous souhaitons tous être le début de la fin de la pandémie, plusieurs classes d’actifs se trouvent à des points de jonctions importants. Les potentielles conséquences sont nombreuses pour un portefeuille équilibré qui vise d’abord à protéger le patrimoine détenu.

Dans cette lettre financière, nous passerons en revue les grandes classes d’actifs et leur situation actuelle assez inusitée. Sur un plan historique, tout semble cher en ce moment. Voyons de quoi il en retourne exactement.

Y a-t-il une juste valeur?

Quelle devrait être la juste valeur des divers actifs financiers à ce stade d’un cycle économique totalement anormal? Dressons d’abord un portrait sommaire de la situation actuelle causée par la pandémie :

• Le soutien des autorités monétaires sous forme de liquidités injectées a été sans précédent partout dans le monde
• Les principales places boursières sont à leur sommet historique
• Les taux d’intérêt sont globalement à un creux historique

La plupart des économistes s’entendent pour dire que les banques centrales ont bien fait de soutenir massivement les économies nationales partout sur la planète. Ces injections de liquidités ont toutefois brisé certaines relations entre les classes d’actifs et elles ont aussi bousculé les étapes normales d’un cycle économique. Dans le premier cas, on a vu les actions et les obligations connaitre des mouvements à la hausse en même temps tellement l’argent débordait de partout, et dans le deuxième cas on a connu une combinaison chute/reprise parmi les plus marquées et rapides de l’histoire.

Mais maintenant qu’une part d’incertitude et de « nouveauté » provenant du coronavirus est derrière nous, où se situent les grandes classes d’actifs et comment devrions-nous les aborder?

Le marché obligataire

Si l’on additionne les obligations gouvernementales et corporatives, le marché obligataire, ou à revenu fixe, est beaucoup plus imposant mondialement que toutes les places boursières réunies. Comme la valeur des obligations varie en sens inverse des taux d’intérêt, la chute des taux vers zéro l’an dernier a bénéficié à cette classe d’actifs. L’autre côté de la médaille est qu’au niveau actuel des taux d’intérêt, les obligations pourront difficilement répéter leur performance de l’an dernier.

Pourquoi détenir des obligations à ce moment-ci alors? Nous y reviendrons plus loin.

Le marché boursier

Quel que soit l’angle sous lequel on analyse les indices boursiers, leur valorisation actuelle est à un degré de cherté parmi les plus élevés jamais vus. Quelques exemples éloquents:

Le ratio cours-bénéfice: Il correspond au prix divisé par les revenus (souvent les revenus escomptés). Entre d’autre termes, c’est le nombre d’années de revenus « espérés » qu’il faudra pour équivaloir au prix payé pour acquérir le titre. Ces dernières années pour le S&P500, ce ratio s’est situé à 16 au sommet d’octobre 2007 avant la crise financière qui l’a ramené à 10 en mars 2009. Puis il était de 19 au sommet historique de février 2020 avant que la dégringolade du début de la pandémie ne le ramène à 13 en mars 2020. Or, il se situe actuellement à près de 23.

L’indice Warren Buffet : L’une des mesures préférées du célèbre investisseur est calculée par la part du marché boursier dans l’économie totale, soit la capitalisation boursière divisée par le PIB. Historiquement parlant, cette mesure tourne autour de 80%. Au plus fort de la bulle technologique des années 2000, elle avait atteint un mirobolant 140% avant de revenir à un niveau plus raisonnable. Elle se situe aujourd’hui à plus de 230%, de loin un record.

La valorisation d’une action est fondée sur l’analyse des revenus futurs. Les optimistes du marché boursier diront que les prix gonflés actuels reflètent l’anticipation de bonnes nouvelles à venir. L’incongruité de cette posture est que lorsque lesdites bonnes nouvelles arrivent, elles ne devraient que confirmer le prix qui les inclut déjà, alors qu’elles font quand même monter les indices pratiquement à chaque fois. Quelque chose ne tourne pas rond.

Pourquoi détenir des actions à ce moment-ci alors? Nous y reviendrons aussi plus loin.

Les classes d’actifs privés

Devant des marchés publics (obligations et actions) qui semblent se trouver à des point de jonctions incertains, il devient important de pouvoir accéder aux classes d’actifs dites privées ou alternatives, incluant l’immobilier, les placements privés (Private Equity), les infrastructures et la dette privée.

En plus de diversifier un portefeuille, ces actifs offrent généralement des rendements appréciables et affichent une volatilité moindre dans leur valorisation, étant moins sujets à des grands mouvements de marchés irrationnels. Outre certaines modes risquées à éviter comme celle des SPACs (chèques en blanc à des fonds privés), cette grande classe d’actifs traditionnellement moins accessible aux investisseurs a démontré sa valeur au cours du temps.

Comment y accéder? Vous l’aurez deviné, nous y revenons plus loin.

Le bitcoin et ses comparses

Devenu l’un des sujets favoris des boursicoteurs (Day Traders), les cryptomonnaies défient toute logique et toute analyse économique fondamentale. Les bitcoin, ethereum, litecoin et autres dogecoin feront fort probablement partie de tous les livres d’histoire financière, et sans doute pas dans le chapitre des instruments sensés.

Les manchettes de rendements dans les trois chiffres sont fréquentes pour ces instruments qui ne s’appuient sur rien d’autre que la spéculation. Il n’existe en effet aucune façon de valoriser formellement les cryptomonnaies comme on peut le faire avec la plupart des autres actifs financiers. Le seul appui est l’espoir que quelqu’un nous l’achètera plus cher qu’on l’a soi-même payé.

Comme plusieurs l’ont souligné, seuls les criminels sont ravis de l’existence d’un moyen totalement opaque de déplacer des sommes d’argent qu’on a intérêt à cacher. Pour tous les autres, les alternatives sont nombreuses, ce n’est donc pas un élément de rareté ou d’exclusivité qui pourrait donner sa valeur au bitcoin. Sans compter que l’opacité est telle que 20% des bitcoins (valant des dizaines de milliards de dollars) ont été perdus et seront impossibles à retrouver, par simple oubli des mots de passe pour y accéder. Pas très fonctionnel comme « monnaie ».

Sur un plan moins financier mais qu’il est tout aussi important de souligner, les cryptos sont une catastrophe environnementale qui siphonne énormément d’énergie en puissance de traitement informatique pour encrypter leur information. Par exemple, une seule transaction bitcoin exige la même énergie que 700,000 transactions par carte de crédit. De fait, si le bitcoin était un pays, il serait à lui seul le 29ième consommateur d’énergie dans le monde, soit davantage que 170 pays. Tout ça pour un actif purement spéculatif dont ni les marchés, ni les citoyens n’ont vraiment besoin.

Nous n’y reviendrons pas plus loin.

Quand tout est cher

Conséquence directe de l’ampleur de l’aide publique durant la pandémie, beaucoup d’argent circule dans le système et cherche un endroit où se poser, ce qui exerce une pression à la hausse sur les prix. Vous avez une collection de vieilles cartes ou de vaisselle vintage? Vous avez une voiture usagée à vendre? Des meubles? Tant mieux pour vous, les prix sont à la hausse dans à peu près tout. Une bonne nouvelle économique? Les actions montent sous prétexte que la reprise fera augmenter les profits. Une mauvaise nouvelle économique? Les actions montent sous prétexte que les taux demeureront bas plus longtemps.

Dans un cycle économique normal, nous aurions vu les taux de défaillances d’entreprises et de ménages augmenter fortement à la suite des confinements de 2020 et 2021. C’est en soi une très bonne nouvelle pour les ménages et les entrepreneurs que l’État soit intervenu si promptement et si généreusement. Dans le meilleur des cas, l’économie aura repris d’elle-même quand l’État se retirera inévitablement. Dans le moins bon scénario, une partie des conséquences économiques de la pandémie n’aura été que repoussée et fera mal en temps et lieu.

Quoi détenir?

Les valorisations actuelles sont largement biaisées par l’ampleur des liquidités qui ont été déversées sur les marchés ces derniers 12 mois. À quel point sont-elles fiables quand des milliers de milliards ont artificiellement coulé partout pour soutenir tout ce qui existe ou presque?

Chose certaine, le principe de diversification demeure, quel que soit le contexte. Détenir des actifs variés dans plusieurs classes d’actifs demeure un point de départ dont on ne peut s’extraire dans une optique de protection du patrimoine.

Par ailleurs, compte-tenu que les deux grandes classes d’actifs publics (obligations et actions) sont toutes les deux à des stades de corrections potentielles, il est moins facile qu’en temps normal de s’assurer d’un rendement « sécure » de 5% par exemple.

Les obligations pourraient-elles connaitre une rare année négative? Ce n’est pas impossible. Mais s’il devait y avoir correction sur les marchés, il est toujours moins douloureux de voir un portefeuille obligataire reculer de quelques points de pourcentage, que de voir son cousin boursier perdre quant à lui quelques dizaines de points de pourcentage. Détenir une allocation aux obligations est donc indiqué malgré les taux actuels, surtout qu’un bon choix de gestionnaire peut encore prodiguer des rendements positifs, entre autres avec des obligations à plus haut rendement.

Il en va de même pour une portion en actions qui peut bénéficier d’une rotation entre les secteurs et les types d’actions détenues. En 2020, plusieurs titres boursiers individuels avaient connu une année négative malgré que l’indice lui-même ait affiché un bon rendement. L’inverse est vrai: un bon gestionnaire spécialisé peut identifier des titres qui progresseront même dans un marché baissier.

Nous arrivons donc aux actifs privés, qui semblent plus que jamais représenter une part incontournable de l’allocation d’actifs. Produits typiquement accessibles surtout (ou seulement) aux investisseurs institutionnels, nous travaillons à changer la donne et à créer des véhicules qui pourront ajouter ces actifs à votre portefeuille. Ils pourront améliorer le profil rendement/risque en ces temps de valorisation élevée des traditionnelles classes d’actifs publics. Nous vous tiendrons bien sûr informés des développements à ce sujet.

En toute circonstance, notre priorité demeurera la même, soit de voir d’abord à la préservation de votre patrimoine et à l’atteinte de vos objectifs.

En parallèle, nous espérons que vos plus précieux actifs, soit votre santé et celle de ceux qui vous sont chers, se maintiennent à la meilleure valorisation possible!